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Hivernage de la roquette

Contrairement à de nombreuses plantes potagères qui craignent le froid, la roquette est une culture qui peut non seulement survivre à l’hiver, mais aussi y prospérer avec une protection adéquate. La saveur de ses feuilles a même tendance à s’adoucir et à s’améliorer après les premières gelées légères. L’hivernage de la roquette permet de prolonger considérablement la saison de récolte, offrant ainsi des salades fraîches et piquantes même au cœur de l’hiver. Pour réussir cette culture hivernale, il est essentiel de choisir les bonnes variétés, de planifier les semis à l’automne et de mettre en place des structures de protection adaptées au climat de ta région. Avec un peu d’anticipation, le jardin peut rester productif et verdoyant bien au-delà des mois traditionnels de culture.

La clé de la culture hivernale réside dans le fait que la croissance des plantes ralentit considérablement avec la baisse des températures et la diminution de la durée du jour. L’objectif n’est pas tant de faire pousser la roquette en hiver que de la semer à la fin de l’été ou au début de l’automne pour qu’elle atteigne une taille récoltable avant l’arrivée des grands froids. Les protections hivernales servent alors à maintenir les plants en vie et en bon état, permettant des récoltes intermittentes tout au long de la saison froide.

L’hivernage de la roquette ne demande pas nécessairement des infrastructures complexes. Selon la rigueur de ton climat, un simple paillage épais ou un voile d’hivernage peut suffire à protéger les plants des gelées modérées. Pour des conditions plus sévères, des structures comme un tunnel nantais, un châssis froid ou une serre non chauffée offrent une protection supérieure et permettent de créer un microclimat plus clément pour les plantes.

La gestion de la culture en hiver diffère de celle des autres saisons. L’arrosage devient beaucoup moins fréquent, car le sol reste humide plus longtemps et les besoins de la plante sont réduits. Il est crucial de veiller à une bonne aération des abris pendant les journées ensoleillées pour éviter la condensation et le développement de maladies. Récolter avec parcimonie permet également de ne pas trop affaiblir les plants, qui doivent conserver leur énergie pour survivre au froid.

La sélection des variétés résistantes au froid

Toutes les variétés de roquette ne sont pas égales face aux rigueurs de l’hiver. Pour maximiser tes chances de succès, il est primordial de choisir des variétés spécifiquement sélectionnées pour leur rusticité et leur résistance au froid. Ces variétés d’hiver ou d’automne ont généralement une croissance plus lente et un feuillage plus robuste et plus découpé que les variétés de printemps. Elles sont génétiquement programmées pour mieux supporter les basses températures et les gelées légères.

Lors de l’achat de tes semences, recherche des indications telles que « résistante au froid », « variété d’hiver » ou « rustique » sur les paquets. Des variétés comme la « Roquette cultivée améliorée » ou certaines souches de roquette sauvage (Diplotaxis tenuifolia), qui est naturellement plus vivace, sont souvent de bons choix pour une culture hivernale. N’hésite pas à te renseigner auprès de semenciers locaux ou d’autres jardiniers de ta région pour connaître les variétés qui se sont avérées les plus performantes dans ton climat spécifique.

Le semis de ces variétés doit être planifié avec soin. Il doit être effectué suffisamment tôt en automne (généralement en septembre ou début octobre, selon les régions) pour que les plants aient le temps d’atteindre une taille suffisante avant que la croissance ne soit stoppée par le froid intense et les jours courts de l’hiver. L’objectif est d’avoir des plantes bien établies, avec un système racinaire développé et un feuillage abondant, prêtes à affronter la saison froide.

Même avec les variétés les plus résistantes, une protection sera souvent nécessaire pour traverser les périodes de gel les plus intenses. Cependant, le choix d’une variété adaptée constitue la première et la plus importante étape. Une variété non rustique, même bien protégée, aura beaucoup plus de mal à survivre et à rester productive qu’une variété sélectionnée pour sa capacité à endurer les conditions hivernales. C’est un investissement initial en recherche qui portera ses fruits tout au long de l’hiver.

La protection des cultures avec des voiles d’hivernage

Le voile d’hivernage est un outil simple, économique et très efficace pour protéger la roquette du froid. Il s’agit d’un textile non-tissé, très léger et perméable à l’air et à l’eau, qui crée un microclimat plus doux autour des plantes. En fonction de son grammage (généralement entre 17 g/m² et 30 g/m²), un voile d’hivernage peut permettre de gagner plusieurs degrés, faisant la différence entre des feuilles gelées et une récolte préservée.

La mise en place du voile est simple. Il peut être posé directement sur les cultures, mais il est préférable de l’installer sur des arceaux pour créer un mini-tunnel. Cette structure évite que le poids du voile, surtout lorsqu’il est chargé de pluie ou de neige, n’écrase le feuillage. Les arceaux maintiennent un volume d’air isolant entre le voile et les plantes, ce qui améliore l’efficacité de la protection. Le voile doit être bien ancré au sol avec des pierres, des planches ou en l’enterrant légèrement pour éviter qu’il ne soit emporté par le vent.

L’un des grands avantages du voile d’hivernage est qu’il laisse passer la lumière, ce qui permet à la plante de continuer la photosynthèse, même si elle est ralentie, durant les journées ensoleillées d’hiver. Il est également perméable à l’eau de pluie, ce qui évite d’avoir à découvrir les cultures pour les arroser. Cependant, il est important de vérifier l’humidité du sol de temps en temps, car sous le voile, l’évaporation est réduite.

Pendant les périodes de redoux ou les journées d’hiver particulièrement ensoleillées, il peut être judicieux de soulever le voile pendant quelques heures pour aérer les cultures. Cette aération permet d’évacuer l’excès d’humidité qui pourrait s’accumuler et favoriser le développement de maladies fongiques. Le voile d’hivernage est une solution flexible et polyvalente, idéale pour les climats aux hivers modérés ou pour protéger les cultures des premières et dernières gelées de la saison.

La culture sous abri pour une récolte hivernale

Pour les régions aux hivers plus rigoureux ou pour ceux qui souhaitent une protection maximale, la culture sous abri est la solution la plus fiable. Un châssis froid, un tunnel nantais ou une serre non chauffée offrent un environnement beaucoup plus contrôlé et protégé qu’un simple voile. Ces structures permettent de cultiver la roquette même lorsque les températures extérieures descendent bien en dessous de zéro et que le sol est gelé en surface.

Un châssis froid est essentiellement une caisse sans fond, souvent en bois ou en parpaings, recouverte d’une vitre ou d’un panneau de plastique transparent. Il se place directement sur la parcelle de culture. L’effet de serre créé à l’intérieur réchauffe le sol et l’air pendant la journée, et la structure protège efficacement les plantes du vent, de la pluie et du gel nocturne. C’est une méthode traditionnelle et très efficace pour les petites surfaces.

Le tunnel de forçage, ou tunnel nantais, est une version plus grande du principe des arceaux et du voile. Il est généralement recouvert d’un film plastique plus épais et résistant qu’un simple voile d’hivernage. Cette structure permet de couvrir plusieurs rangs de roquette et offre une protection thermique supérieure. Elle est facile à monter et à démonter, ce qui en fait une option très populaire auprès des jardiniers amateurs pour la production hivernale.

La culture en serre, même non chauffée, offre le plus haut niveau de protection. La grande masse d’air à l’intérieur de la serre a une inertie thermique plus importante, ce qui lisse les écarts de température entre le jour et la nuit. Il est crucial d’assurer une bonne ventilation de la serre, même en hiver, en ouvrant les portes ou les lucarnes pendant les heures les plus chaudes des journées ensoleillées. Cela prévient la surchauffe et l’accumulation d’humidité, qui sont les principaux risques de la culture sous abri.

La gestion de l’arrosage et des soins en période de dormance

La gestion des soins pour la roquette hivernante est bien différente de celle pratiquée en pleine saison de croissance. Le principal changement concerne l’arrosage. En hiver, les besoins en eau de la plante sont considérablement réduits en raison de la faible évaporation, de l’humidité ambiante plus élevée et de la croissance ralentie. Un excès d’eau est bien plus dangereux qu’un léger manque, car il peut entraîner la pourriture des racines dans un sol froid.

Il ne faut arroser que lorsque le sol est sec sur plusieurs centimètres de profondeur, et toujours avec parcimonie. L’arrosage doit se faire de préférence le matin, par une journée ensoleillée, pour que l’excès d’humidité ait le temps de s’évaporer avant la nuit et le risque de gel. Il est impératif de ne jamais arroser lorsque des gelées sont annoncées, car l’eau pourrait geler dans le sol et endommager les racines.

La récolte en hiver doit également être pratiquée avec modération. Il est conseillé de prélever seulement quelques feuilles extérieures sur chaque plant à la fois, en laissant toujours le cœur intact et suffisamment de feuillage pour que la plante puisse continuer la photosynthèse et survivre. Comme la croissance est très lente, voire nulle, chaque feuille prélevée mettra beaucoup de temps à être remplacée. Une récolte trop sévère pourrait épuiser et tuer la plante.

Enfin, il faut rester vigilant face aux ravageurs et maladies qui peuvent aussi trouver refuge sous les abris. Les limaces, par exemple, peuvent être actives pendant les périodes de redoux. L’aération régulière des tunnels et châssis est la meilleure prévention contre les maladies fongiques. Il faut également retirer régulièrement les feuilles jaunes ou abîmées pour maintenir une bonne hygiène de la culture. Avec ces soins adaptés, la roquette peut fournir de précieuses récoltes jusqu’au retour du printemps.

📷 Flickr / Szerző: Maja Dumat / Licence: CC BY 2.0

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